Le sabbat est traditionnellement décrit comme une assemblée nocturne de sorcières, un espace nourri de récits inquiétants et d’associations démoniaques. À travers ce projet, il s’agit d’interroger cet imaginaire collectif en s’éloignant des représentations stéréotypées, afin d’en proposer une lecture critique. Car, bien qu’imaginaire, le sabbat a constitué un prétexte puissant pour la condamnation et l’exécution de nombreuses femmes accusées de sorcellerie.
La Suisse occupe une place particulière dans cette histoire : elle fut le foyer de la seconde vague de chasses aux sorcières qui traversa l’Europe du XVe au XVIIe siècle. Rapporté à sa population, le pays conserve l’un des taux de condamnations les plus élevés d’Europe, une donnée qui continue de hanter sa mémoire historique.
Ce projet propose une relecture visuelle du sabbat, conçue comme une tentative de réhabilitation symbolique des victimes de ces persécutions. Toute iconographie accusatrice – pactes diaboliques, scènes de débauche – en est volontairement exclue, afin de laisser émerger des images qui puissent tenir lieu de mémorial. Dans ces dessins, les formes apparaissent évanescentes, enveloppées de drapés semblables à ceux par lesquels on dissimule le corps des morts. Mais ce qui semble d’abord être des silhouettes charnelles se révèle être la survivance d’esprits, encore en mouvement, porteurs d’une histoire qui refuse d’être oubliée.